Toute crise porte en elle potentiellement la possibilitĂ© dâĂ©mergence dâun bouc Ă©missaire, plus encore lorsquâil sâagit dâune crise sanitaire oĂč la peur est omniprĂ©sente. Quand on nâa pas dâexplication rationnelle Ă une crise sanitaire, quand on ne sait presque rien Ă propos dâun virus responsable dâune Ă©pidĂ©mie et surtout quâon ignore comment soigner les ravages quâil engendre, on a besoin de mettre de la comprĂ©hension » sur le processus, ainsi Jean Delumeau, auteur de La Peur en Occident 14e â 18e siĂšcles, Ă©crit Nommer des coupables, câest ramener lâinexplicable Ă un processus comprĂ©hensible. » Dans le cas de la pandĂ©mie de la COVID19 la peur est sans doute lĂ , sous de multiples formes, renforcĂ©e par lâignorance de la science vis-Ă -vis de ce nouveau virus ; cette peur cherche un chemin de conjuration dans des formes aussi multiples quâelle-mĂȘme, aussi irrationnelles. Par exemple, jâavais Ă©crit comment je voyais dans les sĂ©ances dâapplaudissement en faveur des soignants au printemps dernier plus une façon de conjurer la peur en apportant une offrande aux Ă©missaires les soignants dâun dieu rĂ©dempteur et salvateur que lâexpression dâune solidaritĂ©. Si nous nâen sommes pas encore Ă une chasse aux sorciĂšres qui chercherait une victime expiatoire quâon dĂ©signerait comme responsable de la pandĂ©mie, les gouvernants et les mĂ©decins, sans doute pour amoindrir les consĂ©quences sociĂ©tales de leurs dĂ©cisions ou plus vraisemblablement pour ne pas prendre de dĂ©cisions embarrassantes, dĂ©signent telle ou telle catĂ©gorie de la sociĂ©tĂ© pour porter seule le poids de la cause des restrictions Ă la vie sociale. On crĂ©e ainsi un phĂ©nomĂšne de bouc Ă©missaire qui, ici, devient seul porteur des choix gouvernementaux comme Ă©tant celui sur qui la sociĂ©tĂ© fait porter le poids du devoir dâagir et du coĂ»t financier et Ă©conomique pour la sauver. Ăcartons, isolons, ghettoĂŻsons les personnes ĂągĂ©es, les personnes vulnĂ©rables et les handicapĂ©s pour sauver la sociĂ©tĂ© et Ă©teindre la pandĂ©mie ! Pour la suite de lâexposĂ© je regrouperai ces catĂ©gories de personnes dites vulnĂ©rables sous le terme de vieux ». Cette position, bien peu scientifique, repose sur deux erreurs. La premiĂšre est mĂ©dicale, les vieux ne transportent pas plus, plutĂŽt moins, le virus que les jeunes ne serait-ce que parce quâils se regroupent moins et quâils circulent moins combien frĂ©quentent lâuniversitĂ©, combien hantent les bars le soir ? La deuxiĂšme est Ă©conomique, isoler les vieux a des consĂ©quences Ă©conomiques Ă court terme car ceux quâon dĂ©signe comme dĂ©tenteurs dâun pouvoir dâachat supĂ©rieur Ă la moyenne ne peuvent plus dĂ©penser. Mais les consĂ©quences Ă©conomiques seront surtout Ă long terme en matiĂšre de dĂ©penses de santĂ© report ou abandon des soins, Ă©mergence de nouveaux maux en raison dâun moindre service dâaide Ă domicile, dĂ©pression, etc. Certes les vieux sont, statistiquement, plus nombreux en rĂ©animation que les jeunes, environ 50 % des lits sont occupĂ©s par des personnes de plus de 61 ans. Chose extraordinaire il semble que lâon dĂ©couvre que les vieux rĂ©agissent trĂšs mal aux attaques virales et prĂ©sentent des tableaux symptomatiques graves, nâest-ce pas le cas pour toute maladie. DĂšs lors on focalise sur eux nâoccuperaient-ils pas trop de lits dans les hĂŽpitaux, notamment en rĂ©animation ? En consĂ©quence le problĂšme ne serait plus celui de lutter contre lâĂ©pidĂ©mie mais de faire baisser le taux dâoccupation des lits de rĂ©animation dont il est vrai que notre systĂšme de santĂ© en est fortement dĂ©pourvu. Ăvidemment personne ne peut afficher une telle dĂ©marche alors on parle de protection des plus vulnĂ©rables parce quâon les aime ». On enferme les vieux chez eux, dans les EHPAD ou dans les centres de soins, et pendant ce temps les jeunes continuent Ă courir le guilledou, Ă aller de cafĂ©s en lieux festifs, buvant et braillant plus quâil nâen faut pour oublier les gestes barriĂšre et larguer dans lâatmosphĂšre des quantitĂ©s phĂ©nomĂ©nales de particules virales qui finissent toujours par infecter les vieux qui devront ĂȘtre isolĂ©s, coupĂ©s de la sociĂ©tĂ© et de leur famille plutĂŽt que de saturer les hĂŽpitaux. Câest bien lâoption choisie par le trĂšs mĂ©diatique Martin Blachier, Ă©pidĂ©miologiste coâmanageur de la sociĂ©tĂ© privĂ©e Public Health Expertise qui vend des services de modĂ©lisation mĂ©dico-Ă©conomique, qui dĂ©clarait le 18 aoĂ»t sur Europe1 DâaprĂšs cette modĂ©lisation, en isolant les personnes les plus vulnĂ©rables sĂ©niors, personnes atteintes dâun handicap ou dâune maladie chronique, "la courbe sâaplatit et la saturation hospitaliĂšre est Ă©vitĂ©e". Afin que le nombre de morts en France ne dĂ©passe les il faudrait protĂ©ger ces personnes pour une durĂ©e de 38 semaines, soit jusquâau 8 fĂ©vrier prochain. » Ce faisant les Ă©pidĂ©miologistes font fi des relations sociales et de la santĂ© psychique de cette catĂ©gorie particuliĂšrement vulnĂ©rable sur les plans affectif et psychique. Comme lâĂ©crit le psychiatre Serge Tisseron dans ÂŁe Monde en ne parlant que des EHPAD Et les familles, tenues Ă©loignĂ©es de leurs sĂ©niors, ont pu craindre que ceuxâci vivent la situation comme un abandon, pensent que leurs enfants ne les aimaient plus, et en deviennent dĂ©sespĂ©rĂ©s. » Le gouvernement fort de lâexpĂ©rience avec sa cohorte de dĂ©pressions, de dĂ©pĂ©rissement et de morts, a assoupli sa position en autorisant pour ce deuxiĂšme confinement les visites dans les EHPAD, mais quid des vieux isolĂ©s chez eux. Reprenons les choses en amont et essayons de mesurer les dĂ©placements, le nombre de rencontres et la nature des activitĂ©s que font les vieux dans une journĂ©e et comparons avec ceux des jeunes qui prĂ©sente le plus fort potentiel de propager le virus ? SantĂ© Publique France indiquait le 26 octobre que 32 % des CLUSTER se situaient en milieux scolaires et universitaires, et ce chiffre ne prend pas en compte, par essence en raison de la dĂ©finition dâun CLUSTER, ce qui se passe dans les bars, les restaurants et les salles de spectacle et moins encore ce qui se passe dans les rencontres plus ou moins informelles fĂȘtes dâanniversaire, soirĂ©e dâintĂ©grationâŠ. Pourtant, non sans ambiguĂŻtĂ©, câest ce quâindiquait, le 18 aoĂ»t dernier sur Europe 1, le mĂ©diatique docteur Martin Blachier Jâai toujours cru Ă la clartĂ© des consignes. [âŠ] Aujourdâhui, le virus circule parmi les jeunes, donc toutes les fĂȘtes de famille dans des lieux clos, il faut les annuler. » Il y a plein de jeunes qui portent le virus aujourdâhui [âŠ], donc si vous avez deux grands-mĂšres et une tante qui sont contaminĂ©es, vous risquez de les envoyer en rĂ©animation. Ne faites pas ça », et il appelait Ă privilĂ©gier tout ce qui se fait Ă lâextĂ©rieur ». Donc les jeunes sont invitĂ©s Ă continuer Ă se contaminer et Ă disperser le virus, sauf chez les vieux auxquels ils sont sommĂ©s de ne plus rendre visite. Lâautre volet de lâambiguĂŻtĂ© de ce propos porte sur lâ extĂ©rieur », considĂšreâtâon quâun bar est un extĂ©rieur » ? La terrasse sans doute est un extĂ©rieur » mais que vaut-elle quand chacun est proche de lâautre, sans masque ? Dâautre part fautâil, comme lâon fait le gouvernement et de nombreuses municipalitĂ©s autoriser lâextension des terrasses, bruyantes et empiĂ©tant les trottoirs jusquâĂ les supprimer, au dĂ©triment des riverains ? Lâanalyse du Dr Blachier rejoint celle de lâĂ©conomiste Samuel Sender Covid 19 lâanalyse coĂ»ts bĂ©nĂ©fices des restrictions plaide pour des mesures diffĂ©renciĂ©es par Ăąge », parue sur The Conversation Dans une trĂšs intĂ©ressante approche Ă©conomique par lâanalyse des coĂ»ts Samuel J Sender de la EDHEC business School montre trĂšs bien comment et combien les vieux ont un coĂ»t exorbitant que la sociĂ©tĂ© peinerait Ă supporter. Il explique que si les analyses ont bien pris en compte les acteurs Ă©conomiques que sont les entreprises et les salariĂ©s en fonction des secteurs, aucune diffĂ©renciation nâa Ă©tĂ© faite entre les diffĂ©rentes catĂ©gories de personnes dans la composante prĂ©vention/santĂ© » ». Il dĂ©crit cette diffĂ©renciation comme essentielle pour lâĂ©laboration des politiques publiques, sachant que les diffĂ©rentes catĂ©gories ne sont pas Ă Ă©galitĂ© devant la maladie et que ces inĂ©galitĂ©s entraĂźnent des Ă©carts de coĂ»ts. Il sâagit alors de trouver la politique publique la plus efficace au moindre coĂ»t, donc lâaction la plus efficace pour rĂ©duire le nombre de malades en rĂ©animation et plus globalement Ă lâhĂŽpital. Ainsi une meilleure prise en compte des retraitĂ©s aurait permis dâĂ©viter la saturation des places de rĂ©animation, de sauver lâessentiel des vies, mais aussi dâallĂ©ger la pression sur le personnel soignant compte tenu de la forte mortalitĂ© Ă lâhĂŽpital des retraitĂ©s malades de la COVID. » Sâappuyant ensuite sur les rĂ©sultats dâune enquĂȘte qui montrerait que ce sont les actifs qui auraient le plus soufferts du confinement alors que la probabilitĂ© dâun dĂ©cĂšs [dans cette catĂ©gorie] nâest pas statistiquement significative » il en dĂ©coule suivant lâauteur que Les actifs dans leur ensemble tout Ă perdre psychologiquement et Ă©conomiquement des mesures restrictives, pour un gain non significatif du point de vue de la santĂ©. » La dĂ©monstration est mathĂ©matiquement dâune grande rigueur et Ă©conomiquement dâun ordre financier et comptable imparable. Mais, une sociĂ©tĂ© se rĂ©duit-elle Ă son Ă©conomie financiĂšre ? Aussi sâinquiĂ©teraâtâon de lâimpact de la conclusion de lâarticle de Monsieur Sender Il semble donc plus que jamais nĂ©cessaire de dĂ©velopper une communication aux personnes ĂągĂ©es et aux personnes fragiles sur les dangers dâune contamination par la Covid. La circulation du virus Ă©tant active, il est sans doute plus pertinent de recommander voire dâimposer aux personnes fragiles dâappliquer les mĂȘmes mesures dâhygiĂšne et prĂ©caution dans les rĂ©unions privĂ©es que celles imposĂ©es dans les rĂ©unions publiques. » Mais dans la vraie vie ça ne se passe pas comme ça ! Certes, la chose est bien documentĂ©e, toute crise Ă©conomique entraĂźne son lot de dĂ©pressions et de suicides, faut-il pour autant refuser de rĂ©flĂ©chir Ă ce quâest une vie et Ă ce quâelle vaut ? DâĂ©vidence S. Sender se place dans la posture de lâĂtat patriarcal qui mesure les vies Ă lâaune de ses intĂ©rĂȘts, contrairement Ă lâĂtat philanthropique qui soupĂšse ses intĂ©rĂȘts Ă lâaune des vies. Ici, que ce soit M. Brachier, S. Sender ou E. Macron, ce sont les intĂ©rĂȘts de lâĂtat, notamment ceux des dominants du monde entrepreneurial, qui prĂ©valent sur les vies que les vieux soient Ă©cartĂ©s de la sociĂ©tĂ©, que les actifs aillent trimer et quâimportent les conditions, et que les jeunes, insouciants, continuent la fĂȘte pour le plus grand bĂ©nĂ©fice des tenanciers de bars ! On ne peut pas rĂ©duire la vie des personnes Ă un coĂ»t financier, il faut parfois accepter des coĂ»ts importants pour construire une sociĂ©tĂ© harmonieuse et sereine. Lâarticle de Monsieur Sender est dans la droite ligne de la pensĂ©e libĂ©rale qui a dĂ©truit le systĂšme de santĂ© français au prĂ©texte dâune Ă©quation coĂ»ts bĂ©nĂ©fices dĂ©favorable les malades, notamment les vieux » coĂ»tent trop cher, dâautant plus quâils ne rapportent rien Ă la machine Ă©conomique. DĂ©sormais le vieux dont on pouvait dire que lorsquâil sâĂ©teignait câĂ©tait une bibliothĂšque qui disparaissait, nâest plus acceptable que sâil rapporte en crĂ©ant de facto des emplois dans les EHPAD, aides Ă domicile, etc., en dĂ©pensant sans compter ses Ă©conomies ; si dâaventure une maladie, comme le montre Sender, vient Ă faire quâil coĂ»te plus quâil ne rapporte, il faut lâĂ©carter de la sociĂ©tĂ©. Si Monsieur Sender posait sa calculatrice, sortait de son bureau et allait respirer lâatmosphĂšre sociale il constaterait que les vieux ont terriblement souffert des mesures de restriction, combien dâentre eux se sont retrouvĂ©s isolĂ©s, parfois sans les soins dont ils ont besoin ; certains ont fait une dĂ©pression, ont dĂ©pĂ©ri perte de poids considĂ©rable, aggravation des troubles cognitifs, etc., certains en sont morts. Cette mort nâest pas comptabilisĂ©e par Monsieur Sender pour qui, visiblement, les personnes se rĂ©duisent Ă des objets mathĂ©matiques. En outre il commet des erreurs grossiĂšres dans sa conclusion. Les vieux sont sans doute les personnes qui, statistiquement, ont le mieux respectĂ© les consignes sanitaires, bien plus que les jeunes dont on sait Ă quel point ils ne respectaient pas les gestes barriĂšres dans les bars et autres lieux festifs, donc si message il doit y avoir câest plutĂŽt en direction de ces derniers. Ceux-ci dâailleurs, autant que les vieux, devraient appliquer ces gestes barriĂšre lorsquâils sont en famille notamment lorsquâils rendent visite Ă un ancien. En outre lâanalyse de S. Sender et celle de M. Brachier sont Ă courte vue, ne prenant en compte que les hospitalisations et les dĂ©cĂšs du moment, des Ă©lĂ©ments rĂ©ellement dĂ©favorables aux vieux, ils font lâimpasse sur un Ă©lĂ©ment remarquablement dĂ©favorable aux actifs, notamment aux jeunes dont beaucoup sont atteints par le virus et sont malades sans ĂȘtre en rĂ©animation ni mĂȘme hospitalisĂ©s les sĂ©quelles et leur coĂ»t en matiĂšre dâĂ©conomie de la santĂ© ne sont pas nĂ©gligeables. On sait maintenant que des personnes atteintes par la Covid fusse dans une forme bĂ©nigne peuvent avoir des sĂ©quelles qui, entraĂźnant des arrĂȘts maladie, auront un coĂ»t Ă©conomique sur le fonctionnement des entreprises et sur le budget de la SĂ©curitĂ© sociale. Enfin, croire quâen isolant les seuls vieux on arrĂȘtera le virus câest voiler une grande partie de ce quâest cette pandĂ©mie et câest ne pas vouloir reconnaĂźtre que les jeunes sont des vecteurs, sans doute les principaux, de la dissĂ©mination virale. Malheureusement, nous sommes dans une sociĂ©tĂ© dirigĂ©e par lâĂ©conomie, qui a supplantĂ© la sociologie, la psychologie et la philosophie, lâHumain nâexiste plus, seuls ont raison dâĂȘtre pour les gouvernants, notamment en 2020, lâhomo Ă©conomicus, la femme et lâhomme acteurs et objets de lâĂ©conomie. Seuls les indicateurs Ă©conomiques et les chiffres ont de lâimportance comme le rappelle Camille Peugny dans Alternatives Ăconomiques qui indique quâentre le 1er mars et le 26 octobre 60 % des dĂ©cĂšs concernent des personnes de plus de 80 ans, et il Ă©crit Cela donne assurĂ©ment des arguments Ă ceux qui dĂ©fendent la thĂšse du sacrifice des jeunes gĂ©nĂ©rations au nom du salut des plus ĂągĂ©s. » Quel sacrifice demandeâtâon aux jeunes quâon ne demanderait pas aux vieux ? Serge Tisseron psychiatre et dâautres, psychologues et sociologues, rappellent lâimportance des relations sociales pour les jeunes, Ă lâinstar dâAlain MĂ©gier sociologue qui qualifie les restrictions de drame social absolu » qui empĂȘche de devenir adulte On prive les jeunes de ce quâil y a de plus important pour eux la possibilitĂ© de faire des rencontres et donc de se construire. » Tous gomment que ces relations sociales sont toutes aussi importantes pour les vieux. LĂ oĂč les jeunes pouvaient attĂ©nuer les effets de lâabsence de relations sociales par lâusage des moyens numĂ©riques, les vieux ont Ă©tĂ© enfermĂ©s dans lâisolement le plus total, physique et affectif. Quant aux rencontres les jeunes auraient pu en faire en rejoignant les associations dont les bĂ©nĂ©voles ĂągĂ©s Ă©taient mis sur la touche, ces rencontresâlĂ sont trĂšs enrichissantes et remarquablement formatrices. Mais on prĂ©fĂšre favoriser la fĂȘte Ă tous crins, lâĂ©vasion de la vie dans des beuveries nocturnes et des produits hallucinogĂšnes ; on prĂ©fĂšre une vie de plaisirs individuels, Ă©goĂŻstes Ă une sociĂ©tĂ© dâengagement et de rapports humains profonds. Câest un choix. Mais de grĂące posons les pieds par terre et nâomettons pas de nous souvenir de ce que nos anciens ont vĂ©cu en leur temps. Certes la vie nâest pas facile pour les jeunes, lâest-elle pour tous les vieux ? A. MĂ©gier qui Ă©crit Or le contexte est dĂ©jĂ compliquĂ© pour les eux [les jeunes] il nâa jamais Ă©tĂ© aussi difficile de se projeter dans lâavenir car il nâa jamais Ă©tĂ© si incertain. Entre la crise Ă©cologique, la prĂ©carisation du couple, etc. tout semble fragile. », Il faut demander sâil pense quâau dĂ©but du 20e siĂšcle, quâentre 1939 et 1945, les choses Ă©taient plus faciles pour les jeunes, penseâtâil que les jeunes du choc pĂ©trolier » dans le milieu des annĂ©es 1970 et de lâĂ©mergence dâun chĂŽmage consĂ©quent nâont pas eu dâangoisses ? Et peut-on penser que les vieux nâavaient pas besoin dâaide de la part de leur famille, de leurs proches ? Ces besoins, psychiques et affectifs autant que matĂ©riels Ă©taient attendus comme lâindique lâEspace Ăthique Ile de France Au dĂ©but de la crise, nous constations une forte demande dâaide des personnes vivant avec un handicap auprĂšs des professionnels. Aujourdâhui, les personnes attendent de lâaide Ă 60,1 % par des voisins, Ă 5 % par les amis, Ă 55 % par la famille, et Ă 24 % par des professionnels enquĂȘte Handifaction. En pĂ©riode de pĂ©nurie de professionnels sur le terrain, les personnes en situation de handicap veulent sâappuyer sur la famille, les voisins et les amis. » JusquâĂ E. Macron, vraisemblablement en quĂȘte de voix pour 2022, qui veut faire pleurer sur le sort des jeunes On a fait vivre Ă la jeunesse quelque chose de terrible Ă travers le confinement on a interrompu leurs Ă©tudes, ils ont des angoisses sur leurs examens, leurs diplĂŽmes et leur entrĂ©e dans lâemploi. » Il est sĂ»r que les jeunes mobilisĂ©s en septembre 1939 nâont rencontrĂ© aucune difficultĂ© de ce type ? Eux, se sont battus pour reconstruire leur vie et le pays. Que penserait Guy Moquet de lâattitude des jeunes dâaujourdâhui et des adultes promoteurs de lâinsouciance juvĂ©nile ? Mais le chef de lâĂtat a indiquĂ© dans un communiquĂ©, vendredi dernier, ne pas souhaiter de discrimination entre nos concitoyens », a aussi appelĂ© ces retraitĂ©s Ă la responsabilitĂ© individuelle », donc les jeunes peuvent sans restriction et sans vergogne faire Ă©talage de la plus complĂšte irresponsabilitĂ©. Pourtant, face Ă lâadversitĂ© dĂ©crite Ă raison par A. MĂ©gier, Macron et les intellectuels du microcosme des mĂ©tropoles car Paris sâest reproduit par scissiparitĂ© il y a deux postures pour les jeunes sâabandonner dans les plaisirs jusquâĂ plus soif et se lamenter sur leur sort, ou ĂȘtre responsables, sâengager et construire la sociĂ©tĂ©. Câest ce type de discours glorifiant lâinsouciance et lâirresponsabilitĂ© des jeunes et les confortant dans une plainte permanente vis-Ă -vis des difficultĂ©s qui met les vieux en position de bouc Ă©missaire et qui conduit Ă une ghettoĂŻsation. Ce nâest pas en opposant les gĂ©nĂ©rations quâon construit une sociĂ©tĂ© dâautant quâelles disposent de suffisamment de potentiels intrinsĂšques pour se heurter entre elles naturellement. Allons-nous aller vers une sociĂ©tĂ© oĂč les vieux seront sommĂ©s de choisir de disparaĂźtre comme le suggĂšre la position de Larry R Churchill rapportĂ©e par le Professeur Roger Gill, Directeur de lâEspace de RĂ©flexion Ăthique de Nouvelle-Aquitaine, dans le Billet Ăthique 2020Ââ19, Entre Ăągisme et appel au sacrifice, tenter la fraternitĂ© » quâil mâautorisera Ă le citer longuement En cette pĂ©riode pandĂ©mique, des personnes qui se dĂ©signent comme personnes ĂągĂ©es se sont exprimĂ©es dans le cadre du Hastings Center pour expliquer leurs positions Ă lâĂ©gard de leur fin de vie. Deux grandes positions sâaffrontent. La premiĂšre est celle dĂ©fendue par Larry R Churchill, Professeur Ă©mĂ©rite dâĂ©thique mĂ©dicale. Ă lâapproche de ses 75 ans et en excellente santĂ©, il sâimpose un certain nombre dâobligations se considĂ©rer comme dĂ©jĂ infectĂ©, et ĂȘtre particuliĂšrement vigilant sur le lavage des mains, la distanciation sociale et lâĂ©limination des occasions non essentielles dâexposition ; sâabstenir dâutiliser les services de soins de santĂ© chaque fois que cela est possible⊠; sâabstenir de se faire dĂ©pister ou permettre Ă dâautres de se faire dĂ©pister en premier, mĂȘme sâil a des symptĂŽmes ; dâautres ont beaucoup plus dâintĂ©rĂȘt que lui, dĂ©clareât-il, Ă connaĂźtre leur statut ; si les hĂŽpitaux sont dĂ©bordĂ©s, sâabstenir dâĂȘtre hospitalisĂ©, mĂȘme si cela est recommandé⊠En espĂ©rant que les soins palliatifs seront plus facilement accessibles. Sâil est hospitalisĂ© et que les ventilateurs restent rares, il dĂ©clare renoncer Ă la ventilation au profit de patients plus jeunes ; il dĂ©clare aussi se mettre dans les derniers rangs quand un vaccin deviendra disponible. Il explique quâen cas de rationnement des soins liĂ© la pandĂ©mie, voire de triage, son comportement ne tĂ©moignera ni de rĂ©signation, ni dâabandon, ni dâenvie de mourir mais dâune prise de responsabilitĂ© permettant dâallĂ©ger la charge qui pĂšse sur les besoins de soins. Il dĂ©clare sa position fondĂ©e sur une approche Ă©thique de la vie entiĂšre » quâil considĂšre non comme un sacrifice mais comme la manifestation dâune gĂ©nĂ©rositĂ© celle dâutiliser avec parcimonie le systĂšme de soins pour que les plus jeunes puissent y accĂ©der. Une telle position en lâabsence de toute pathologie et qui est autoqualifiĂ©e de gĂ©nĂ©reuse nâest-elle pas susceptible dâimpliquer que celles et ceux qui ne souhaitent pas renoncer Ă la vie manifestent de lâĂ©goĂŻsme ? Nâest-elle pas susceptible de gĂ©nĂ©rer une certaine honte Ă vivre ? » Choisissons la fraternitĂ© » ! Cela devrait avoir un certain Ă©cho Ă un moment oĂč le prĂ©sident de la RĂ©publique et dâautres mettent tellement en avant les valeurs de la RĂ©publique LibertĂ©, ĂgalitĂ©, FraternitĂ©. Des valeurs qui perdent leur sens si on oppose les uns aux autres, si on oppose les jeunes et les actifs contre les vieux ».
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